La Cité du vin de Bordeaux prête à accueillir les premiers visiteurs
Le 1er juin, la Cité du vin de Bordeaux ouvrira ses portes. Visite en avant-première de ce bâtiment destiné à faire rayonner le savoir-faire viticole.
Bertrand Escolin (Bureau de Bordeaux du Moniteur)
Sa silhouette caractéristique en tore métallique aux reflets moirés lui a valu plus de louanges que de critiques. Nicolas Desmazières et Anouk Legendre de l’agence XTU (Paris) ont remporté le concours lancé par la Ville haut la main en avril 2011. Le maire Alain Juppé témoignait alors qu’aucun des autres projets, tous de grande qualité, n’avait réuni l’unanimité des suffrages du jury. Sans doute, grâce à cette forme arrondie qui évoque le mouvement du vin dans un verre.
A l’époque, on parle encore du nom de code «Cité des civilisations du vin». Son contenu scénographique, conçu par Casson Mann, commence, en effet, par un parcours permanent sur les civilisations du vin: Sumer, Egypte et tous les principaux terroirs mondiaux actuels, passant du Rioja au Chili sur des tables de projection, des cellules, des tablettes vidéo, dans un parcours très immersif. L’ouïe est mobilisée, avec ses enregistrements de biotope viticole, grillons, grenouilles, chants d’oiseaux, soir d’orage sur le vignoble, etc. Et au cœur du parcours, des tables olfactives, qui mettent en nez les différents arômes du vin: café, cuir, fruits rouges, pamplemousse, tartine grillée, etc. De quoi mettre l’eau à la bouche: trois espaces de restauration ponctuent le parcours où les salles plus professionnelles de dégustation se manifestent par leur «crachoir». Au dernier étage, un bar avec vue imprenable sur la Garonne et le pont levant Chaban-Delmas n’attend plus que ses flacons et ses touristes fluviaux. Quelques encablures et stations de tram séparent désormais la Cité de l’embarcadère qui accueillera cette année 25 paquebots et des dizaines de navires touristiques fluviaux (CroisiEurope y fait tourner deux navires).
La profession du vin s’est réunie ici en fondation, participant largement au financement, avec un objectif d’attractivité touristique nationale et internationale: la Cité est incluse dans les parcours des opérateurs de croisière et séjours à thème. A 10 jours de l’ouverture, prévue le 1er juin prochain, tout était prêt, des abords paysagers dessinés par Camille Jullien, à la boutique du rez-de-chaussée, seul endroit que l’agence XTU n’a pas dessiné. Ne restent quelques finitions, et à remplir les bars et œnothèques.
Une architecture située
Première sensation à l’abord extérieur: même sous le ciel chargé, la Cité renvoie des reflets mordorés d’une paroi métallique sérigraphiée en double peau. Anouk Legendre évoque «les reflets du ciel changeant en bord de Garonne, sa forme et ses couleurs». Le bâtiment se revendique d’une architecture située. «La Cité ne pourrait pas être ailleurs qu’à Bordeaux. Elle évoque par sa forme caractéristique le tourbillon du vin dans un verre, la structure bois apparente et le mobilier bois rappellent les barriques du vin de Bordeaux et nous avons privilégié partout, autant que possible, la vue sur la Garonne, notamment avec les espaces de restauration et le bar restaurant panoramique au sommet de la tour» explique Nicolas Desmazières.
De l’extérieur, la cité se présente comme un tore de métal et verre sérigraphié qui développe ses courbes autour d’une ossature bois de 574 arches cintrées en lamellé-collé et d’une tour centrale, le belvédère, qui culmine à 55 mètres de hauteurs sur les bords de la Garonne. Le bois, visible partout, évoque ici les fûts de conservation mais aussi la forêt associée au vignoble et aux civilisations du vin. L’auditorium présente un plafond de tubes de bois suspendus, qui fait écho au plafond de bouteilles suspendues du bar au sommet du belvédère.
Expériences interactives
Le parcours permanent se développe sur 3000 m2 et, sous les voûtes cintrées de bois, propose 22 modules d’expériences interactives. Immédiatement squattées par les premiers visiteurs étrangers, en avant-première, au son d’une cheffe de groupe «Hurry up, we are late», les tables à projection : on s’assied à trois grandes tables, où un écran fait dialoguer un jeune sommelier, où la cheffe landaise Hélène Darroze avec les convives imaginaires, attablés de manière sonore, avec vous, sur une table où se projettent met et vins divers. Enfantin, mais bluffant. Premiers rires de gorge d’une touriste déjà éméchée...
La structure évoque l’arche, le navire, qui traverse l’histoire du vin, jalonné de grandes bouteilles en bois, qui abritent des espaces vidéos et sonores. Un banquet sur écran nous montre plaisamment quelques hommes illustres anachroniquement attablés et déjà rivalisant sur les meilleurs crus «du Bourgogne, bien sûr; comment cela, des vins andalous ?». L’humour n’est donc pas absent de la scénographie, tout de même destinée à un public très international, pas forcément inculte. D’ailleurs, aucune «brasserie» n’est prévue, mais un «buffet des cinq sens», trois salles de dégustation et autant d’ateliers pédagogiques pour jeunes et adultes. Le public scolaire est visé à l’évidence. Et les travaux personnels encadrés des collégiens devraient y trouver un terreau favorable.
Projet durable
L’architecture bois est très présente et le bureau Le Sommer Environnement a notamment pris soin de l’aspect durable du projet: revêtement de sol en caoutchouc, préféré au PVC, récupération des eaux de pluie en bassin pour l’arrosage du jardin intérieur et des abords, utilisation massive du lamellé-collé visible partout et du bois d’ameublement, meubles, bouteilles, bars, sièges et décoration. Enfin, la double peau d’enveloppe métallique à distance de la structure crée une ombrière qui protège efficacement du soleil et laisse largement pénétrer la lumière naturelle, appuyée par un éclairage LED dans les zones immersives.
Côté chiffres, on citera 9000 m3 de béton et 1000 tonnes d’acier pour la structure, 8000 heures de travail et 17 500 heures de fabrication de l’ossature bois, mise en œuvre en 15 000 heures. La vêture extérieure représente 2235 m2 de verres plans (jaunes), bombés (verts) et à écaille (rouges) répartis en 2500 panneaux de formes et dimensions différentes, cintrés sur place ou en atelier. La maquette numérique a été largement mise à contribution «indispensable pour nous et l’un des tout premier bâtiments de cette importance à être réalisé en BIM à Bordeaux» évoque l’architecte.
Programme: dix niveaux, trois espaces de dégustation, un salon de lecture, une boutique «concept store», trois espaces de restauration en rez-de-jardin et un restaurant panoramique.
Maître d’ouvrage: Ville de Bordeaux.
Maîtrise d’œuvre: XTU, Anouk Legendre et Nicolas Desmazières, architectes (Paris); Casson Mann (scénographie); SNC Lavallin (BET généraliste et économiste); RFR (BET façades complexes); Le Sommer environnement (BET environnement); Camille Jullien (paysagiste); 8’18 (éclairage); Peutz & Associés (acousticien); Autobus Impérial (signalétique); Casso&Cie (sécurité); Roland Cahen (designer sonore), Anthony Hamon (scénographie auditorium).
Entreprises: GTM Bâtiment Aquitaine, mandataire lot clôt couvert; Coveris, vêture; Smac, vêture métallique et étanchéité; Arbonis, charpente bois.
Surface: 12 927 m2 shon
Coût global: 81 millions d’euros.
Ouverture: 1er juin 2016.
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