Les dirigeants du bâtiment de plus en plus rodés en stratégie d'entreprise

Les entreprises du secteur de la construction seraient-elles en train de changer de profil ? C'est en tout cas un fait que semble pointer une enquête de la Fédération française du bâtiment (FFB) auprès de 200 de ses adhérents, présentée le 15 octobre, à Paris, lors des troisièmes rencontres du Syndicat des entreprises de génie climatique et de couverture plomberie (GCCP) et de la Chambre syndicale des entreprises d'équipement électrique de Paris et sa région (CSEEE).

L'organisation professionnelle a défini six cultures d'entreprises, allant de "l'artisan local" au "businessman" (voir encadré ci-dessous). Et, dans le bâtiment, ces dernières années, l'un de ces modèles a le vent en poupe : celui de "dirigeant organisateur". "Ce type d'entrepreneur estime que la clé de la réussite est dans la rigueur et l'analyse des marchés, explique Jérôme Vial, directeur de la stratégie et des projets réseaux de la FFB. Souvent, ce type de dirigeants délègue la vente et la technique à d'autres salariés." Les entrepreneurs "organisateurs" représentent environ un adhérent de la FFB interrogé sur quatre. Une proportion qui n'était pas si importante il y a dix ans.

"Les dirigeants du bâtiment ont l'impression que la valeur ajoutée quitte le chantier"

A l'inverse, les entreprises fonctionnant sur un modèle plus traditionnel (gestion "patriarcale") sont de moins en moins nombreuses et souffrent davantage de la crise. "Le type 'entreprise familiale' était très majoritaire parmi nos adhérents : il l'est moins aujourd'hui", constate Jérôme Vial. Cette évolution est toutefois à nuancer : les entreprises fonctionnant sur un modèle familial et les artisans locaux représentent tous deux la moitié des deux-cents entreprises interrogées. "Il n'y a pas de modèle meilleur qu'un autre : mais c'est aux entreprises d'adapter leur culture au marché qu'elles visent." Il ressort de l'étude que les entreprises de type "familial" sont celles qui ont le plus de mal à s'adapter aux nouveaux marchés.

Si chaque entreprise adopte donc sa propre stratégie, la majorité d'entre elles sont d'accord pour dire que nous nous dirigeons vers un "changement de modèle". Et qui ne bénéficiera pas, a priori, aux entreprises. "Les dirigeants se posent des questions sur la place de la valeur ajoutée, rapporte Jérôme Vial. Ils ont l'impression que celle-ci est en train de migrer vers l'amont : conception, ingénierie, études. La valeur ajoutée quitte le chantier !" Ce qui peut expliquer qu'un grand nombre d'entre eux essayent de mieux maîtriser la croissance de leur entreprise.

Les six familles de cultures d'entreprises dans le bâtiment

Dans une étude présentée le 15 octobre, à Paris, la Fédération française du bâtiment différencie six types d'entreprises oeuvrant dans son secteur :

- L'artisan local : il ne cherche pas forcément à grandir. Il délègue peu et fait surtout du sur-mesure. Il ne sélectionne pas vraiment ses marchés et s'intéresse peu à la gestion d'entreprise.

- L'artisan spécialiste : il travaille sur un créneau bien défini. Il est fier de son travail et est prêt à s'éloigner de ses bases pour répondre à des marchés.

- Dirigeant d'entreprise familiale : il est attentif à pérenniser le nom de son entreprise, en général de taille moyenne. Il dispose de clients fidèles et est soucieux de sa réputation. Le lien entre le dirigeant et les salariés, en général, est fort. C'est ce modèle d'entreprise qui, actuellement, est un peu mis à mal dans le bâtiment.

- Dirigeant organisateur : la clé de la réussite, pour lui, est dans la rigueur et l'analyse des marchés. Il peut déléguer la production et la commercialisation. C'est ce type d'entreprises que l'on retrouve plus fréquemment ces dernières années.

- Dirigeant "industriel" : il se concentre sur le pilotage de la production. Il cible une clientèle, parie sur un marché, et investit dans un process. Il apprécie les chantiers qui sortent de l'ordinaire pour faire état de sa maîtrise technique.

- "Businessman" : il fait des affaires, sur un modèle proche du capitalisme financier. Son objectif est d'arriver le plus tôt possible sur des marchés en développement. Ce type d'entrepreneurs est apparu dans les années 2000 dans le bâtiment, mais tend à être plus rare depuis la crise.

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