La commande publique et l’urbanisme, secteurs les plus exposés au risque de corruption
Le dernier rapport annuel du Service central de prévention de la corruption (SCPC) publié le 27 juin, dont une partie est consacrée cette année au secteur public local, alerte sur les risques de corruption dans les collectivités et suggère quelques solutions.
Bénédicte Rallu
Avec la décentralisation qui a multiplié les centres de décisions, la crise, un contrôle de légalité et financier diminué, les conditions sont réunies pour accentuer le risque de corruption dans le secteur public local. La Commission européenne, dans son premier rapport anticorruption dans l’UE (1), avait déjà pointé la fragilité du niveau local. Le Service central de prévention de la corruption, chargé d’analyser la corruption en France, le confirme dans son dernier rapport annuel publié le 27 juin.
La commande publique est l’un des domaines d’activité des collectivités locales les plus exposés, note le SCPC. Notamment dans le bâtiment, les travaux publics, l’eau, l’assainissement. Une grande partie des marchés se passent en dehors des procédures formalisées depuis les relèvements des seuils, la négociation se développe, le cadre réglementaire s’est assoupli, autant de facteurs d’accentuation du risque de corruption, selon le SCPC. Pour le réduire, il propose de développer les chartes de déontologie spécifiques à l’achat public listant bonnes et mauvaises pratiques, sanctions potentielles, et conditions d’accès des citoyens aux documents relatifs aux procédures. Mais aussi d’assurer une meilleure traçabilité de la passation des contrats (logiciels marchés, obligation de publicité des réunions de commissions d’appel d’offres…). Il préconise également de rendre obligatoire l’établissement de rapports de négociation et de développer le contrôle de l’exécution des contrats par un meilleur encadrement des avenants entre autres.
Publicité et transparence
L’urbanisme et l’urbanisme commercial constituent un autre terrain propice au dévoiement. Les tentations sont grandes d’influer sur les décisions de zonage dans les plans locaux d’urbanisme pour faire varier la valeur vénale d’une parcelle, dans l’octroi des autorisations d’urbanisme (des refus abusifs peuvent être opérés à des fins d’extorsions de fonds), dans l’exercice du droit de préemption (dans le but d’évincer certains promoteurs ou acquéreurs jugés indésirables), etc. Le SCPC suggère de réexaminer toute la législation et réglementation sous l’angle de la prévention des atteintes à la probité. En attendant, quelques mesures simples pourraient être appliquées : rendre obligatoire la publicité de l’identité des personnes physiques et morales concernées par les modifications de zonage, soumettre les décisions en matière d’urbanisme à la délibération collégiale du conseil municipal ou du conseil communautaire, imposer la règle du déport en cas de conflit d’intérêts à toutes les étapes de la décision.
Le SCPC souligne également la fragilité d’autres domaines d’intervention des collectivités et de leurs groupements : habitat, logement, gestion des domaines publics (autorisations d’occupation temporaires) et privé des collectivités et EPCI, aides accordées aux opérateurs économiques, gestion des entreprises publiques locales, des OPHLM et régies immobilières ou encore des fonds européens.
Devant la diversité des sources potentielles de risques de corruption, le SCPC propose donc une réforme de la gouvernance (limitation du cumul des mandats, développement des déclarations d’intérêts et de patrimoine, amélioration de la transparence et des mesures de publicité), de la gestion locale (chartes de déontologie, formation, transparence dans les recrutements d’agents territoriaux..) et le développement du contrôle et des audits internes et externes pour mieux prévenir le risque.
(1) La corruption coûte près de 120 milliards € par an aux Etats de l’Union Européenne (lire notre article).
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