Passage à la dématérialisation des marchés publics : que c’est long…
Avec le retard pris par la France en matière de marchés publics électroniques, tenir l’échéance de 2018 pour la dématérialisation complète des procédures tient de la gageure.
Sophie d’Auzon
« Il reste trois ans aux acteurs de la commande publique pour passer d’un taux de réponse électronique d’environ 10% à un taux de 100% ! ». Selon Sébastien Taupiac, directeur délégué aux offres complexes de l’Ugap (centrale d’achat public) intervenant lors d’une matinée Weka sur la dématérialisation le 26 février, la marche est haute. Et le succès passera par la contrainte. En témoigne l'expérience de l'Ugap. En effet, les centrales d’achats seront soumises à l’obligation de dématérialisation totale en 2016, deux ans avant l’échéance fixée par les directives européennes pour les autres acheteurs publics. « L’Ugap a devancé cette date ; nous avons progressé très vite dans la réponse électronique en l’imposant à nos fournisseurs ». Et ainsi atteint l’objectif de 100% depuis 2014. « Nous avons gagné environ 30 % de temps sur la passation d’un appel d’offres, en dématérialisant jusqu’au bout, notification des marchés et facturation comprises. Mais il ne faut pas se leurrer, explique Sébastien Taupiac, une telle démarche nécessite des investissements en outils informatiques, des formations, de l’accompagnement, une impulsion forte de la direction ou des élus… Et une implication de toute la chaîne, jusqu’au comptable public ».
Finie la méthode de l’éponge
Cela suppose aussi, renchérit l’autre intervenant de la matinée, Emmanuel Poidevin, expert à la Commission européenne et fondateur d’e-Attestations, de s’attaquer à « la question de la confiance numérique, qui est à la fois un problème technique et juridique. Avec la dématérialisation, le contrôle ne repose plus sur l’acheteur public, mais sur l’outil informatique. A ce sujet, l’Europe investit des sommes importantes dans le cadre du programme « e-sens » (1) pour fournir des modules intégrables dans les logiciels », afin notamment d’assurer la sécurité dans la passation des marchés publics en ligne.
« Depuis que nous recevons des offres électroniques, relève Sébastien Taupiac, nos juristes sont encore plus exigeants, vérifiant par exemple dans les moindres détails le niveau de certificat électronique utilisé par les entreprises… » Au temps du papier, un petit coup d’éponge mouillée sur la signature servait de contrôle : si l’encre bave, la signature est authentique !
Les e-candidatures facilitées
Que ce soit sous la contrainte ou par appétit, acheteurs publics et entreprises passeront à la dématérialisation dans les prochaines années. De l’avis des deux intervenants et d’un certain nombre de participants, la phase actuelle est la plus compliquée, car les réponses papier et les réponses électroniques coexistent, ce qui entraîne deux process différents à mener de front. Côté candidatures, l’arrivée du Dume (document unique de marché européen) devrait un peu accélérer et faciliter les choses… « Les acheteurs publics choisiront leurs critères, et génèreront sur cette base un Dume qu’ils publieront avec l’avis d’appel public à concurrence », décrit Emmanuel Poidevin. Cela permettra aux entreprises de constituer leur dossier de candidature simplement, avec un minimum de pièces à fournir. Mais ce n’est pas pour tout de suite ! Le formulaire européen de Dume « n’est pas encore prêt de sortir, ajoute-t-il. Son utilisation sera en pratique vraiment généralisée en 2018 en France, compte tenu du retard pris. Les éditeurs l’auront intégré d’ici début 2016. »
(1) "Electronic simple european networked services" : programme de soutien aux services publics en ligne transfrontaliers.
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